Les Verts se sont opposés depuis le début à une mise en œuvre stricte et discriminatoire du nouvel article constitutionnel 121a. A leurs yeux, il est important de mettre en œuvre cette nouvelle disposition à l’aune de la Constitution, de nos obligations internationales en matière de droits humains et en vue du maintien de l’ALCP et de nos relations bilatérales avec l’UE. Ces objets ont bénéficié, à leur époque, d’un soutien du peuple lors de votes.

Les Verts s’engagent pour le maintien des Bilatérales et leur développement. Ils saluent en ce sens l’objectif de maintenir les relations bilatérales inscrit dans le mandat de négociations sur l’adaptation de l’ALCP du Conseil fédéral et le fait qu’il soit écrit explicitement dans le rapport explicatif que le « nouveau droit constitutionnel ne l’emporte pas automatiquement sur le droit international plus ancien » (chap. 1.1).

Les Verts rejettent donc la révision de la LEtr proposée par le Conseil fédéral et l’introduction de contingents. Un tel système risque d’entraîner la fin des Bilatérales et l’isolement de la Suisse, d’exercer une pression accrue sur les conditions de travail, de pousser les réfugiés et les admis provisoires vers une plus grande précarité – sans parler de la lenteur administrative et des coûts qu’un tel système complexe et rigide engendrerait. Notons encore que, si aucune solution d’application ne devait être trouvée d’ici la date-butoir du 9 février 2017, et que le Conseil fédéral devait édicter une ordonnance, les Verts estiment qu’il ne devrait pas se servir dudit modèle d’application comme solution transitoire.

Il est nécessaire également que l’UE clarifie sa position le plus rapidement possible sur cette proposition de la Suisse de négocier une adaptation de l’ALCP. Mais vu le refus quasi-programmé de l’UE vis-à-vis d’un système de contingents, le Conseil fédéral perd du temps et doit préparer un plan B, sous forme d’un projet euro-compatible. Les Verts regrettent en effet que le Conseil fédéral n’ait pas proposé, tel que demandé par les Verts depuis quasi un an, une 2 e variante de mise en œuvre eurocompatible. Plutôt que des contingents, il est possible de mettre en place d’autres instruments de contrôle de l’immigration, de réduire la dépendance de notre économie envers la main d’œuvre étrangère, ceci afin de mieux gérer l’immigration – tel que le souhaite la majorité du peuple et des cantons. Les Verts demandent donc au Conseil fédéral de proposer à l’UE une variante eurocompatible de mise en œuvre, par ex. sur la base des variantes d’application développées par le Prof. Epinay (cf avis de droit, avril 2014). Cet avis de droit explique clairement la marge d’interprétation juridique et politique du nouvel article constitutionnel et la marge de manœuvre pour l’appliquer de façon euro-compatible en mettant en place un train de mesures fédérales et cantonales pour limiter l’immigration. Rappelons que les dispositions de l’art. 121a ne sont pas exécutables et doivent faire l’objet d’une interprétation – notamment donc à l’aune de la Constitution dans son entier, de nos obligations internationales et de la sauvegarde de la libre circulation des personnes – tel que mentionné d’ailleurs dans le mandat de négociation de l’adaptation de l’ALCP.

Si une application euro-compatible ne devait pas être retenue par le Conseil fédéral ou soutenue par une majorité au Parlement, les Verts soutiendront la tenue d’un vote de clarification, afin de résoudre cette quadrature du cercle. Le Parlement jouera ici un rôle-clé pour préparer ce vote car il devra décider de la stratégie et mener un arbitrage politique : quel vote de clarification souhaite-t-il avoir ? Sur quelle question et avec quels risques en cas d’échec ? Notons encore que pour les Verts, il est important que ce vote de clarification ne s’inscrive pas dans un paquet qui comprendrait d’autres débats prégnants Suisse-UE (tels que, par ex., l’accord sur l’électricité ou le règlement des questions institutionnelles). Ce vote doit se faire indépendamment de ces autres questions.

Mais le plus important sera d’avoir rapidement une clarification quant à l’application de ce nouvel article afin de garantir un minimum de sécurité juridique, aspect important pour la prospérité de la Suisse. Et d’ici ce vote de clarification, il est nécessaire que le Conseil fédéral « fasse ses devoirs » et réponde aux craintes exprimées par la population le 9 février 2014.

Les Verts craignent au final que l’application de l’art. 121a ne se fasse « sur le dos » des ressortissants des Etats tiers, de leurs familles et des réfugiés. En effet, une fois que l’UE aura refusé tout système de contingents pour ses ressortissants, le Conseil fédéral pourrait être « tenté » de l’appliquer uniquement aux familles des ressortissants des Etat tiers, aux réfugiés, aux admis provisoires et à leurs familles. Les Verts rejetteront un tel Plan B qui ne ferait qu’accentuer les différences entre ces deux « classes » de migrant-e-s – ressortissants européens et extra-européens. En résumé, seule une application non-discriminatoire, euro-compatible et garantissant la pérennité des accords bilatéraux pourrait être soutenue par les Verts.

Les Verts saluent encore la volonté du Conseil fédéral de mieux exploiter le potentiel de main d’œuvre des travailleurs résidents, dont les personnes admises à titre provisoire – mais regrettent qu’il ne s’agisse que de « mesurettes » ou de pistes appelées à être encore étudiées en groupes de travail. Pourtant, les solutions existent et ne demandent qu’à être mises en œuvre. Le Conseil fédéral doit agir maintenant afin de prendre au sérieux les craintes exprimées par la population et agir sur notre territoire : 

  • Renforcement des mesures d’accompagnement : renforcer les contrôles (notamment dans les régions frontalières) ; renforcer les commissions tripartites et paritaires ; renforcer la lutte contre la sousenchère salariale (ie dans certaines régions et/ou branches à risque) ; hausse des sanctions pour les auteurs d’infractions (notamment à la loi sur les travailleurs détachés) ; encourager les CCT prévoyant des salaires minimums ; faciliter l’extension des CCT pour des raisons d’intérêts publics, etc.
  • Mieux exploiter le potentiel indigène (et ralentir le braindrain) : offensive dans le domaine de la formation et de la formation continue, dans des domaines ciblés où l’on manque de personnel qualifié tels que la santé ou les MINT ; garantir une meilleure intégration des personnes handicapées dans le marché du travail ; soutien à la réorientation professionnelle, notamment pour les mères qui souhaitent reprendre une activité professionnelle ; garantir une meilleure conciliation entre vies professionnelle et familiale ; encourager un aménagement du travail flexible et personnalisé, etc.
  • Mettre fin au dumping fiscal, mener une promotion économique durable avec un soutien ciblé aux entreprises responsables et localement ancrées.

Le Tessin doit notamment faire l’objet de mesures prioritaires.

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