Le projet du Conseil fédéral va dans le bon sens et reprend une revendication de longue date des Verts. Cependant, seul un système incitatif crédible peut compenser les mesures d’encouragement actuelles. Ne lâchons pas la proie pour l’ombre !
Adèle Thorens Goumaz, conseillère nationale VD

Le Conseil fédéral va probablement lancer demain la consultation sur son propre projet de fiscalité écologique, à savoir un système d’incitation en matière climatique et énergétique (SICE). Le projet a déjà été publié par la Sonntagszeitung (lien). Les Verts saluent le fait que le Conseil fédéral ait opté pour une taxe purement incitative, dont les recettes sont entièrement redistribuées à la population et aux entreprises. Le Conseil fédéral reprend ainsi une revendication de longue date des Verts, qui constituait en outre la base du contre-projet proposé par le groupe vert à l’initiative des Vert’libéraux. Il est aussi positif que le Conseil fédéral envisage de taxer également l’essence.

C’est le résultat qui compte, pas l’instrument
Le projet SICE n’est toutefois pas aussi équilibré que le contre-projet qu’avaient proposé les Verts au parlement. Il fixe des délais beaucoup trop rigides et contraignants pour supprimer les instruments d’encouragement actuels, comme le programme pour l’assainissement énergétique des bâtiments et la rétribution à prix coûtant du courant injecté (RPC), ce qui mettrait un frein brutal aux investissements dans le secteur des cleantech. Par contre, le système d’incitation proposé par le Conseil fédéral pour remplacer ces mesures est décrit de manière très peu contraignante dans le projet. Rien ne garantit donc qu’il aura un effet équivalent aux mesures d’encouragement supprimées en sa faveur.

Le contexte politique actuel fait craindre une interprétation minimaliste du système incitatif très évasif proposé par le Conseil fédéral. Or la suppression pure et simple des mesures d’encouragement au profit d’un système incitatif insuffisant freinerait le tournant énergétique ! Les Verts demandent au Conseil fédéral de revoir sa copie pour garantir que le passage d’un système d’encouragement à un système incitatif se fasse en faveur du tournant énergétique et non à son détriment.

Pour ce faire :

  • Les taxes incitatives doivent avoir un impact au moins comparable sur les objectifs climatiques et énergétiques à celui des mesures d’encouragement supprimées. Il n’est pas question d’abandonner des mesures qui ont fait leur preuve (RPC, programme d’assainissement énergétique des bâtiments) au profit d’une fiscalité écologique au rabais. L’effet positif sur le tournant énergétique doit primer.
  • La taxe sur l’électricité doit être différenciée : elle doit être élevée sur le courant d’origine nucléaire et fossile, mais épargner le courant vert dans une première phase.
  • Le développement de nouvelles technologies doit encore, à l’avenir, pouvoir être encouragé via des instruments adaptés. Faute de quoi l’innovation sera freinée dans notre pays.

Pour les Verts, ce sont les objectifs et les résultats qui comptent: un tournant énergétique crédible, la sortie du nucléaire, la protection du climat. Pour les atteindre, les instruments les plus efficaces et pérennes doivent être privilégiés.