La tournure chaotique que prend l’achat des avions de combat a trois raisons : premièrement, aucun scénario réaliste ne justifie l’acquisition de nouveaux avions. Deuxièmement, la Suisse ne peut plus financer une armée de masse disposant des technologies les plus chères. Les milliards que coûteraient les avions seront bien plus utiles investis dans les transports publics, les énergies renouvelables, la construction de logements d’utilité publique et la formation. Troisièmement enfin, le manque de transparence achève de saper la crédibilité de toute l’affaire.

Les faits se vengent maintenant du rejet d’une requête d’un parlementaire vert par la sous-commission en août 2008. Selon les termes de cette requête, le profil d’exigences, le rapport d’évaluation et les activités de lobbying auraient dû être rendus publics.

Les Verts réclament avec le Groupe pour une Suisse sans armée (GSsA) que tous les documents liés à cette affaire soient publiés. Ils veulent par ailleurs qu’une enquête supplémentaire soit menée par la CdG, dont les compétences sont plus étendues que celles de la sous-commission.

Lobbying de Farner
Les parlementaires qui enquêtent au sein de la CdG ne doivent pas être directement ou indirectement liés aux fournisseurs. Sont en particulier visés les nombreux membres des organisations en relation avec l’agence de relations publiques Farner, telles l’association de politique de sécurité et de techniques de défense (VSWW), la communauté de travail pour une armée de milice efficace et garante de la paix (AWM) et le cercle de travail sécurité et techniques de défense (CSTD). Or on sait que Farner a un mandat de Dassault et a fait précédemment du lobbying pour le F/A-18.

Cette situation bien mal emmanchée ressemble curieusement à celle de 1972. À l’époque, il n’était resté des sept modèles envisagés – dont un de Dassault et un de Saab – que le Milan français et l’étasunien Corsair. La féroce concurrence que s’étaient alors livré ces deux fournisseurs avait généré un imbroglio inextricable. Le 9 septembre 1972, le Conseil fédéral renonçait à l’achat d’avions – également pour des motifs financiers. Il faut aujourd’hui montrer le même courage que le gouvernement du pays à l’époque de la guerre froide, et mettre un terme l’exercice.