Le Ministère public fédéral va à vau-l’eau
La nomination du Procureur de la Confédération n’a que trop tardé. La répression des délits économiques est compromise.
Vacant depuis le 5 juillet 2006, date du retrait de son titulaire, Valentin Roschacher, le poste de Procureur de la Confédération, qui dirige le Ministère public fédéral, n’a à ce jour pas été mis au concours. En automne, trois procureurs adjoints ont donné leur démission. On ignore tout des réflexions qui ont ou non été faites à propos de l’éventuelle redéfinition du poste, de ses missions et de la surveillance qui doit être exercée sur l’activité de cet important organisme. Il est très généralement considéré que le rôle central de ce magistrat dans la poursuite des délits de compétence fédérale n’a pas du tout été assumé de manière satisfaisante ces dernières années et à même gravement dysfonctionné. Il est totalement inacceptable de laisser perdurer une incertitude encore plus nuisible dans cette optique.
Le Ministère public de la Confédération est chargé en particulier de poursuivre les auteurs de délits économiques et le crime organisé. Il s’agit d’une tâche très importante du point de vue de l’éthique et de l’image de la Suisse, en particulier au moment où elle est régulièrement mise en cause pour un certain laxisme dans la fuite de capitaux résultant d’infractions commises à l’étranger, considérées comme des délits ou au moins des contraventions dans notre pays. L’ancien Procureur de la Confédération, Valentin Roschacher, n’a pas su donner l’impulsion nécessaire au bon accomplissement de cette tâche ni des autres qui incombent au Ministère public fédéral ; dès lors, son départ l’été dernier était devenu inévitable. Toutefois, depuis lors, l’inertie du Département de justice et police dans le remplacement de l’intéressé a conduit à un interrègne qui ne fait que prolonger et aggraver le vide institutionnel constaté. Sans faire de procès d’intention au chef de ce département, dont on pourrait éventuellement supputer qu’il n’a guère d’enthousiasme pour la poursuite énergique de la criminalité économique, force est d’admettre qu’une prise en main de cet important dossier s’impose. La première priorité est de mettre un axe fort sur les investigations dans le domaine financier, notamment la poursuite des nouvelles formes de blanchiment (voir à ce sujet les interventions parlementaires du conseiller national Vert Luc Recordon au cours de la session de décembre 2006) ; la seconde priorité consiste à trouver la juste mesure entre l’indépendance essentielle du magistrat à nommer comme Procureur de la Confédération et la non moins indispensable surveillance à exercer sur son activité, qui ne doit en aucune façon relever du pouvoir exécutif. Outrés de cette situation, les Verts attendent une réaction marquée et rapide du Conseil fédéral à ce sujet. Le Ministère public de la Confédération va à vau-l’eau.